La salsa des doulos

Modèle Montecristi de type Borsalino
Cuenca tissé assis « paja de toquilla »
Summum de l’élégance dans les rues de Quito
Avec un ruban noir, c’est un vrai panama.
Costard et mocassins, couleur ivoire
Envoyer la bossa, la grande classe
Comme Henri Salvador sur sa guitare
Et se la couler douce aux Bahamas

Ma casquette de marin, oh ! Tonnerre de Brest !
Essuie une forte averse : il pleut des bières
Haddock reste au port, Cousteau met l’cap à l’Est
Commandant ? Capitaine ? je hais les militaires !
Je porte à la rasta cette gâpette à visière
Mon reggae argentin se prénomme tango
Astor bandonéonne son spleen à Buenos Aires
Sur ma belle Alhambra, je le joue rubato

C’était une valse, me disiez-vous
Alors pourquoi du latino ?
Simplement, parc’que, voyez-vous
Je n’avais rien d’autre sous mon chapeau

Sombrero sur le nez, en guise de parasol
Plombés par le soleil, ivres de tequila
La mine réjouie par les vapeurs d’alcool
De joyeux mariachis chantonnent la bamba.
Et viva Zapatta et la « révolucion »
Rendre les haciendas et les pesos
Et puis la « libertad para su corazon »
Aux Pueblos affranchis par les guérilléros

De la terre de feu jusqu’au septentrion
Au moindre coup de zef, le doulos roule par terre
Avoir un couvre-chef est une tradition
Pourquoi tant de bitos ignorent la jugulaire.
Dans mes Vosges natales, on met le hâbuno
Ce gros bonnet de laine, tricoté main
Le bon vieux passe-montagne ou à défaut
Le béret désuet que portent mes copains

C’était une valse, me disiez-vous
Alors pourquoi du latino ?
Simplement, parc’ que, voyez-vous
Je n’avais rien d’autre sous mon chapeau

La jolie montera, une sorte de bicorne
Coiffe le torero, un signe de bravade
Elle s ‘envole dans les airs au premier coup de corne
Le taureau humilié a porté l’estocade.
L’arène est entachée du sang du matador
La foule est pétrifiée, cesse le paso doble
Le silence glacial a le goût de la mort
Quand donc finiront ces corridas ignobles

Direction l’Alaska, destination mythique
Angoisse sous la chapka, pas touche à la banquise
La vie tient à un fil, avatar climatique
Le passage du Nord-Ouest nourrit les convoitises.
Rencontrer l’utopie tel un conquistador
Partir dans des histoires alambiquées
Voyager en musique, je suis un matamore
Aventurier de la « commedia dell’ arte »

(Téachel – février 2020)